• Cratères d'impacts cométaires du Würm final découverts au centre-sud de la France

     

    Etude morphologique de celui de Marseillette

     

     

    Les traces d’impacts cométaires découvertes depuis 2021 au centre-sud de la France et ayant déjà fait l'objet d'une publicatio prudente dès cette année là sont nombreuses. Mais seule la trace contenant l’ancien étang appelé improprement «de Marseillette » a fait l’objet d’une prospection morphologique étalées sur 3 ans pour plusieurs raisons :

     

    - c’est la plus vaste de toutes,

     

    - la nature des sols et roches impactés est peu variée puisqu’ils datent tous, à l’exception des sols quaternaires éluviaux, colluviaux ou alluviaux, de l’Eocène,

     

    - malgré l’absence de sondages rértoriés (voir Infoterre) ayant pu contribuer à la connaissance des couches profondes sous l'Eocène, le Bureau de Recherches Géologiques et Minières (BRGM) a pu établir sur sa carte de Carcassonne à 1/50 000 un profil géologique en bas du document. Il convient de noter que c'est rarement le cas des autres impacts régionaux détectés.

     

    Cet ex-étang, présente une forme de cuvette à fond plat totalement fermée jusqu’en 1808 et excentrée contre le bord sud-est du vaste cratère qui le contient. Il a toujours été considéré comme résultant de la déflation éolienne provoquée par les vents violents périglaciaires circulant de la Méditerranée vers l’Atlantique ou inversement. Ce n’est qu’en 2021-2022 seulement, qu’il a été prouvé semble-t-il qu'il s'agissait d'un astroblème correspondant à la trace d’un impact cométaire du Würm final- donc très jeune- et par conséquent morphologiquement assez peu érodé. Il appartient à un groupe étendu d’autres impacts plus ou moins voisins provenant d’un même objet (une « super-comète ») désagrégé dans l’espace.

     

    Ils représenteraient les seuls cratères cométaires reconnus à ce jour sur la surface de la Terre.

     

    1- Origine de l’intérêt scientifique porté au site :

     

    En 2021, le survol par photo aérienne d’une région du centre-sud de la France, dans les provinces du Languedoc et Roussillon (région Occitanie), a permis d’identifier curieusement pour la première fois et malgré ses grandes dimensions, une dépression topographique creuse de plus de 200m et d’une superficie de 92 km2. Grossièrement arrondie, elle était occupée jadis très partiellement au sud-est par le fameux étang dit de Marseillette (18 km2) aujourd’hui asséché.

     

    Comme le bassin météoritique de Ries en Allemagne, le cratère n’apparaît pas clairement dans le paysage malgré le couvert souvent boisé tapissant sa face interne. Jamais signalé sans doute pour cette raison par les écrits anciens ou contemporains consultés, seule la dépression de l’étang était reconnue. La percée d’une simple tranchée d’assez faible profondeur (12 à 13m) terrassée au tout début du XIXème siècle (1808) a suffi à le vider entièrement.

     

    Aucun écrit connu ne précise non plus que la cuvette est :

     

    - plus de 5 fois plus étendue que l’étang qu’elle contenait,

     

    - creuse hors-sol de plus de 200 m entre les points haut et bas du cratère.

     

    Ce type d’anomalie morphologique en creux, contraire au drainage arborescent, fait toujours géologiquement et morphologiquement en France l’objet de débats pour identifier son origine. Pourtant, les causes de ce type de singularités terrestres sont bien connues et peu nombreuses mais ne sont pas réunies ici.

    Une prospection aussi détaillée que possible des lieux, menée depuis cette découverte, peut paraître encore loin d’être exhaustive compte tenu de l’aire du site et de la présence de nombreux bois peu pénétrables. Mais elle a permis de dégager les grands traits faisant son originalité.

     

    2-Contexte géographique et morphologique particulier de la zone impactée :

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    Fig. 1 : Vue cartographique de la position de l’ex-étang de Marseillette (cercle orange) par rapport aux villes avoisinantes et à la Méditerranée (centre sud de la France).

     

    L’étang se situait à la limite orientale de « l’isthme gaulois » entre l’Atlantique et la Méditerranée. Cette « étroiture » correspond au chemin le plus court et le plus bas permettant de franchir à 190 NGF la ligne de partage des eaux Atlantique-Méditerranée. De ce fait, elle est empruntée par tous les réseaux régionaux de communication importants dont le Canal du Midi à cheval sur les 2 bassins versants maritimes.

     

    Cette particularité explique la force locale des vents marins méditerranéens ou atlantiques eux-mêmes renforcés au sud par les vents catabatiques issus des glaciers pyrénéens lors des maxima glaciaires.

     

    De plus, son fond aujourd’hui surtout vaseux est en contrebas, contre-nature, de 12 m sous l’Aude, fleuve méditerranéen tout proche du « trou » (740m au plus près au sud). Cette dénivelée est contraire au mode érosif habituel du Plio-Quaternaire français. En effet, les alluvions les plus hautes d’un thalweg sont toujours les plus anciennes en raison de la répercussion sur les fleuves de l’abaissement par à-coups des eaux marines prisonnières des glaces polaires de l’océan mondial. Cette dénivelée signale ainsi soit une anomalie géologique terrestre profonde soit beaucoup plus rarement un impact d’origine extra-terrestre.

     

    Son étude a permis de remettre en cause le consensus ancien, apparemment jamais démenti ni réévalué, d’un creusement par érosion éolienne. Celui-ci estimé grossièrement à beaucoup plus de 12 km3, se serait effectué d’après cette théorie par simple déflation. Il est vrai que la région est célèbre pour ses vents notamment le « marin » venu de la Méditerranée.

     

    Remarques : le nom de Marseillette donné à l’étang est arbitraire car il s’agit seulement d’une des 6 communes (fig.2 ; soit dans le sens horaire : Marseillette, Aigues-Vives, St Frichoux, Rieux-Minervois, Puichéric et Blomac) jadis couvertes partiellement par l’ancien plan d’eau et se rejoignant en biseau en son centre.

     

    Cette singularité est à l’image du parcellaire de l’étang asséché tout proche de Montady-Ensérune vers Béziers (voir fig.1)

     

    En fait, à l’origine le plan d’eau à son maximum était plus étendu et s’étalait sur d’autres communes : Laure-Minervois au nord, Aigues-Vives, Badens et Rustiques à l’ouest. L’étude morphologique détaillée montre en effet des stades de régression de la cote du plan d’eau par l’analyse de l’altitude des replats conservés par l’érosion et ce malgré des zones d’accumulation alluvionnaire du type cônes de déjection. Le replat de la cote 100 NGF, identifié comme le plus haut, n’est peut-être pas le plus ancien. Il est logique de penser que l’eau de la cuvette atteignait le col le plus bas de la périphérie originelle-aujourd’hui érodée- par-dessus lequel elle se déversait.

     

    Les vestiges de ce lac 100 sont très démantelés au contraire de celui de la cote 75 mieux conservé bien qu’empâté localement d’alluvions, de colluvions, d’éluvions et d’éboulis repoussant les courbes de niveau vers le large.

     

    Le reliquat le plus évident de ce paléo-lac débutait au nord de celui de Marseillette. Il s’étendait sur la commune centrale de Laure-Minervois au-delà d’une mince crête linéaire surbaissée (<94 NGF au plus haut) et discontinue, se dédoublant vers l’ouest et portant au centre le village de Saint Frichoux (fig.2). Trois étroits pertuis toujours en place prouvent que les plans d’eau étaient en connexion altimétrique jusqu’à ce que l’étang de Laure finisse par se combler définitivement par des apports alluviaux surabondants. Issus des ruisseaux descendus des flancs internes de la cuvette, et notamment des hauteurs collinaires du nord et de l’ouest. Ces afflux de matériaux s’expliquent par la jeunesse des flancs du bassin versant de la zone affaissée soumise à une vive érosion immédiate.

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    Fig.2 : Photo aérienne couvrant la quasi- intégralité du site de l’astroblème bordé de vallées ombragées. A droite le vieil étang porte la marque de l’impact principal.

     

    L’ex-étang de la carte de Cassini (fig.7) est facilement localisable à droite sur cette photo par son parcellaire géométrique et ses canaux d’irrigation creusés en éventail. Ceux-ci convergent vers un point coté 54 NGF, au centre-droit de la photo. Cette carte marque aussi le point de sortie des eaux offerte par la tranchée terrassée en 1808 et entaillée à travers le col actuel le plus bas de la crête de la cuvette (62.5). Plus au sud, on trouve le canal du Midi et plus bas encore, en limite de photo, les méandres de l’Aude.

    Le bassin versant de la cuvette est surtout bien marqué sur la photo par des collines boisées conservées au nord comme à l’ouest alors que sa périphérie externe est fidèlement suivie par les tracés soulignés de noir de trois cours d’eau et d’une vallée sèche (photo 2).

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    Fig. 3 : Vue partielle de l’étang asséché.

    Cette photo montre au fond une crête boisée rectiligne correspondant à la limite de la cuvette avec en toile de fond (au sud) la montagne d’Alaric annonçant les Corbières et les Pyrénées. La vue étant prise de la face opposée de la dépression, on devine les dimensions de l’étang figuré sur la carte de Cassini.

     

    3- Anomalies géomorphologiques :

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    Fig. 4 : Positionnement des éléments morphologiques clés

    En fait pour fixer les idées, le site dans sa globalité se présente du point de vue géomorphologique comme un « pseudo-volcan » classique, mais totalement inenvisageable géologiquement ici , peu élevé, très aplati, fortement dissymétrique et étalé, doté d’une immense « pseudo-caldeira » centrale.

     

    Comme on le voit sur la figure 4, cette dernière est cernée par le « rempart » du cratère (C2). Ce bourrelet continu, serpente en crête comme en plan selon un tracé et un profil en long rendus complexes par l’agressivité inégale de l’érosion régressive lancée à partir des têtes de thalwegs depuis la « pseudo-caldeira » centrale.

     

    Il retombe lui-même vers l’extérieur (C1), en pente plus ou moins douce, sur 4 segments de vallées différentes, dessinant une boucle fermée. Cette boucle est particulièrement évidente non seulement sur la fig.2 mais surtout sur la feuille géologique à 1/50 000 de Lézignan. Là, les cordons quasi continus d’alluvions enveloppant le site sont bien identifiables :

     

    -de l’Aude au sud (A). La confluence à l’est avec D marque le point bas de la boucle (50 NGF).

     

    - du Clamoux à l’ouest (B),

     

    -d’une courte vallée sèche <4 km au nord (C), d’origine pour le moment énigmatique. Elle assure la fermeture actuelle hydrographique de la dépression, en reliant les thalwegs du Clamoux et du Nadal (D) par un mini-col peu marqué dans le paysage, coté 185 NGF.

     

    -enfin du ruisseau de Nadal (D) à l’est.

     

    Le Clamoux et le Nadal sont des affluents de l’Aude descendus de la Montagne Noire au nord.

     

    Le point noté 54 coïncide avec l’entrée de la tranchée R de la Rigole de l’Etang (déversoir artificiel des eaux de C2).

     

    Les trois ronds noirs correspondent à trois autres dépressions naturelles très curieuses creusées dans et hors la « caldeira .

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    Fig. 5 : Coupe longitudinale SE-NW des retombées extérieures du « cratère ». Noter la dissymétrie altimétrique (exagérée par les échelles) de ses limites.

     

    La dissymétrie du profil est saisissante mais s’explique facilement par la bordure sud de l’impact qui est venue entamer les replats des vieilles terrasses de l’Aude, d’autant plus basses qu’elles sont plus récentes.

     

    De gauche à droite on a ainsi :

     

    - le lit de la Clamoux C1: 160

     

    -le point culminant de C2 : 246

     

    -une longue pente descendant vers I2 avec une encoche (trace du lac primitif ?) à la cote 100

     

    -l’ex-étang I2 doucement pentu vers le sud-est entre 75 et 65

     

    -le prolongement ouest de la butte de St Frichoux : 90

     

    -l’ex-étang I1 : 54

     

    Et enfin l’Aude séparé de I1 par un mamelon coté 75 (C2), découronné des terrasses anciennes du fleuve, coté ici au même niveau (54) comme I1.

     

    La cote 246 est le point culminant de la cuvette ; le point 54 à l’autre extrémité le point le plus bas. Ce dernier coïncide avec l’entrée de la tranchée R de la Rigole de l’Etang (déversoir artificiel des eaux). Le profil est d’abord plutôt plutôt plan à partir de l’ex-étang avant d’être progressivement hérissé d’un réseau inextricable de mini-monticules entrecoupés de bas-fonds disposés de façon de plus en plus incohérente en allant vers l’ouest. Entrecoupés de replats et d’une multitude de thalwegs aux tracés improbables pour la plupart, secs ou drainés par des ruisseaux indigents par temps sec , le paysage est d’une complexité extrême.

     

    La végétation y est dominée par la vigne (vin du Minervois), par quelques cultures céréalières mais aussi par des friches et des bois à l’ouest.

     

    Enfin à l’est de la « caldeira », l’ancien étang récent (I1) forme un contraste saisissant par son extrême platitude, par sa riche végétation (riz et asperges notamment) et la présence de bassins piscicoles.

     

    L’étang disparu (I2), extension vers le nord de I1, est un vaste replat lui aussi cultivé également mais plutôt céréalier.

     

    Remarque : ce replat présente en réalité une légère pente NW-SE due aux apports alluviaux étalés sous forme de cônes de déjection venant du nord-ouest.

     

    Plus bosselé que I1, parsemé de minuscules ilôts, il est parcouru par quelques ruisseaux souvent à sec mais pouvant se transformer en torrents lors « d’épisodes méditerranéens » pour reprendre un terme météorologique actuel. Deux bassins de rétention à Laure-Minervois (fini) et à Aigues-vives (en projet) ont été prévus pour éviter notamment la submersion des rues de ces villages.

    I1 et I2 sont en communication grâce aux 3 pertuis les reliant quasiment à niveau. Pourtant les terres de I1 sont saumâtres au contraire de I2, l’alignement collinaire de St Frichoux faisant obstacle malgré ses trouées.

     

    4-Quelques chiffres :

     

    Des mesures ont permis de chiffrer l’importance des caractéristiques de la zone concernée.

    Cumul du linéaire périphérique Superficie englobée

    C1 52 kms 150 km2

    C2 42 kms 93 km2 (record de France des dépressions fermées possibles)

    Ex-étang I1 18 kms 20 km2

    Ex-étang I2 non chiffrable > 6 km2

     

    5- Histoire de l’étang :

     

    A l’origine, avant l’impact, le site devait se présenter comme un paysage collinaire parcouru de ruisseaux. La comète ayant entaillé de nombreuses terrasses, rissiennes et même würmiennes pour les plus récentes, il est certain que le relief général était dans l’ensemble plus élevé de plusieurs dizaines de mètres avant d’être écrasé par le bolide.

    L’étang cité dès le haut Moyen-Age pour son insalubrité engendrant du paludisme et diverses pandémies, son assèchement aurait d’abord été imaginé dès le XVème siècle. Mis en oeuvre seulement au début du XVIIème siècle par le duc de Sully sous les rois Henri IV puis Louis XIII, ces travaux préfiguraient la Rigole (R) dite « de l’étang ». Un vague trait serpentiforme sur les cartes des figures ????, correspond aux vestiges de ces travaux qui, non entretenus, seraient restés à l’abandon après 1716.

     

    Le projet et la réalisation du Canal du Midi ont permis un legs de cartes anciennes. Pourtant avant la percée de (R), aucun de ces documents ne laisse penser que l’étang avait un déversoir naturel fonctionnel à temps plein tout au moins lors des périodes de déficit en eau.

     

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    Fig. 6 : Carte duprojet du Canal retenu de 1666 de François d’Andréossy, adjoint
    du concepteur (Riquet).

     

    Cette carte est précieuse car elle fait figurer à l’est le fossé d’évacuation (avec le futur pont-canal de l’Aiguille) des eaux de l’étang vers l’Aude entrepris sans doute sous Henri IV. L’efficacité de ce système n’aurait été que partielle au vu de la trace périphérique du niveau primitif des eaux (plus étendue encore plus tard sous Cassini vers le nord). Les chiffres du bas pourraient correspondre à un contre-projet abandonné.

     

    Il faut noter que ce fossé d’évacuation reprend logiquement l’axe du seul paléo-ruisseau ayant pu traverser la couronne I1-C2.

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    Fig. 7 : Carte (peu différente) de 1716 de DeFer (1646-1720)

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    Fig. 8 : Carte de Cassini (1777) englobant non seulement le lac I1 mais tout le périmètre de son bassin versant C2.

     

    Le fossé de drainaged’Henri IV ne fonctionne plus et l’étang a sans doute repris sa forme primitive encore bien perceptible sur place malgré son assèchement.

     

    Le fossé de drainaged’Henri IV ne fonctionne plus et l’étang a sans doute repris sa forme primitive encore bien perceptible sur place malgré son assèchement.

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    Fig. 9 : Superficie de l’étang sous Cassini (environ 18 km2)

     

    Plusieurs observations sont à noter sur ce document précieux:

     

    1) l’étang sous Cassini ne dépassait pas la ligne discontinue de collines basses bordant l’étang en oblique sur sa rive nord-ouest comme celle de St Frichoux. Elle l’isolait plus ou moins d’un autre bassin supposé lui aussi lacustre, situé au-delà vers le nord-ouest jusqu’aux abords de Laure-Minervois (en rouge sur la fig.5). Ce dernier était probablement comblé et asséché bien avant le XVIIIème siècle par les apports alluviaux de divers ruisseaux ravinant les flancs des « bosses » et convergeant vers la dépression.

     

    2) Il figure au nord-est deux métairies riveraines qui existent toujours et permettent par extrapolation d’estimer la cote du plan d’eau à 55 NGF à ce moment, cote identique à la trace mise en culture aujourd’hui.

     

    3) plus bas, vers le sud, il est accolé au relief actuel -dont le replat sommital porteur du Canal du Midi et d’une terrasse datée Fw2 ?-, est inchangé aujourd’hui et n’a subi aucune déformation de terrain.

     

    4) il visualise dans ce secteur, un déversoir sinueux serpentiforme confluant avec l’Aude à Puichéric. Il s’agit sans doute des restes de la Rigole creusée sous Louis XIII et éboulée faute de travaux de maintenance ayant permis au lac de se remettre en eau. Avant cette percée, aucun document ne laisse penser que l’étang avait un déversoir naturel fonctionnel à temps plein.

     

    5) au Nord-Est, il est encadré de terrasses alignées dites plateau de la Serre descendant en pente douce vers l’Aude. De faibles largeurs comparées à leur longueur, elles sont bourrées de blocs et galets siliceux, souvent quartzeux et minéralisés alors qu’au Sud ce type de plateaux très érodés devient plus étroit, discontinu et encadré par le Canal du Midi et l’Aude.

     

    6) partout ailleurs, il est bordé de coteaux présentant une texture « persillée » ou de bassins étendus comme ceux de Aigues-Vives—Badens et du sud de Laure-Minervois déjà mentionné.

     

    7) on perçoit une direction générale de plus en plus divergente du Sud-Est vers le Nord-Ouest des coteaux et des thalwegs, axés sur I1. L’impression générale est que l’étang a projeté avec une puissance colossale dans cette direction des « éclaboussures » suffisamment puissantes pour détruire la morphologie d’origine et réorienter les axes collinaires. Ces éjectas ont préférentiellement attaqué et érodé les marnes mais aussi les grès dans les zones les moins bien protégées.

     

    8) l’excentration de l’ex-étang par rapport au centre de la cuvette.

     

    9) à l’est l’étang de l’Estagnol (cf. ci-après) et surtout son vallon-déversoir conduisant les eaux à l’Aude par un ruisseau pérenne à l’époque reprenant le tracé du ruisseau primitif.

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    Fig. 10 : Carte de l’Etat-Major de 1820-1866. Bassin versant C2 de la totalité de la dépression asséchée par la percée en 1808, vers l’Aude, de la Rigole (au sud-est).

     

    10) La Rigole curviligne en plan, profonde de 12 à 13 m au droit du petit col qui faisait barrage aux eaux est désormais entretenue depuis les travaux de 1808 date retrouvée dans les archives. Son tracé recoupe logiquement à l’est le point le plus bas et le plus remarquable géologiquement de tout le rempart du cratère C2. Elle rejoint le fleuve Aude à la cote 50 NGF à Puichéric après un parcours de 2.5 kms.

     

    Un talus terrassé récemment, sur sa rive gauche, montre que cet obstacle est constitué en surface sur près de 5 à 6m, non par un bombement du substratum éocène, mais par des limons hydrauliques vraisemblablement érodés en surface. Ils correspondent aux vestiges (moins d’un km de long) d’alluvions fines d’un ruisseau fossile, au bassin versant éradiqué à l’ouest par l’impact au droit du Château de l’Etang. Ces limons renferment quelques cailloutis centimétriques reposant en fond de fouille, sur des grès fins gris éocènes altérés en sable dégagés par des terriers.

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    Fig. 11 : Rigole ; talus rive nord. Contact limons ocre- Eocène
    beige-gris grésifié (sable)

     

    Le contact se situe environ vers 56/57 NGF soit environ à 10m plus haut que celui sous l’Aude à Puichéric (47 NGF ; sondage Infoterre). Cette observation capitale permet un début de datation de l’impact, les limons de surface épargnés par la déflagration atteignant encore 62.5 NGF. Or, cette altitude correspond dans le haut bassin de l’Aude à des dépôts du Würm final (moins de 40 000 ans ? date attribuée à la fin des néanderthaliens), sans autre précision possible.

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    Fig. 12 : Bassin versant de la cuvette C2 actuelle.

     

    La longueur maximale de l’étang de Cassini, bien visible ci-dessus en bas à droite (grâce à l’absence du figuré « vigne », entre St Eugène et Marseillette), est de 6.3 km et est strictement perpendiculaire à l’allongement maximal du bassin versant de superficie 92.4km2.

     

    La zone où se nichait l’étang I1, maintenant envasée ou plus rarement sableuse en surface à son extrémité sud-est (d’où les asperges), est grossièrement ovoïde. Sa platitude quasi-totale se distingue de manière marquée de son environnement collinaire. Elle est nettement excentrée par rapport à l’ensemble de la zone étudiée puisqu’elle est littéralement collée du sud-est au sud contre le relief. Elle est en outre diamétralement opposée aux reliefs boisés incurvés convexes (en grisé sur la carte ci-dessous) fermant la cuvette au nord-ouest.

     

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    Fig. 13 : Position de l’étang de Cassini et de la « bulle » C1/C2, sur fond du relief environnant.

     

    Grâce au synthétisme du document de la fig.7, cet étang a dû évoluer au cours du temps de la façon suivante. Au nord-ouest, il ne dépassait donc pas au XVIIIème siècle la ligne discontinue de collines basses (dont celle de St Frichoux) coupant l’étang en oblique. Cette ligne isolait plus ou moins I1 d’un autre large bassin I2 au nord en connexion altimétrique parfaite. Supposé lui aussi lacustre ou palustre, il s’étendait jusqu’à Laure-Minervois. Bien au-delà vers le nord et surtout le sud-ouest, I2 venait se confondre avec les courbes de niveau 75+/-5 et plus loin dans le temps avec la cote 100 comme l’indiquent les ruptures de pente plus ou moins constantes autour de ces altitudes et certains vestiges de sédiments lacustres. Il devait être déjà comblé et asséché avant le XVIIIème par les apports alluviaux de divers ruisseaux descendus des hauteurs du nord-ouest

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    Fig. 14 : Vue partielle, depuis le bas de la butte de la Gardie, de St Frichoux (au fond), village perché sur la succession de buttes alignées séparant I1 de I2.

     

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    Fig. 15 : Reconstitution morphologique minimale du lac I2 à fond plat disparu, deLaure-Minervois.

     

    Le schéma précédent fait abstraction des abaissements successifs subis par ce lac en-dessous des altitudes 100 puis 75 NGF et des nombreux cônes de déjection sous-lacustres.

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    Fig. 16 :Vue d’un des canaux d’irrigation radial creusé dans la vase de I1.

     

    Ce système de canaux est curieusement destiné à l’irrigation mais aussi au dessalement des terres cultivées. Il est alimenté par un prélèvement des eaux de l’Aude, dérivées vers I1, par un souterrain en amont de Marseillette.

     

    5- Etude géologique du site avec extraits des notices des cartes à 1/50 000 de Carcassonne et de Lézignan.

     

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    Fig. 17 : Vue générale de l’étang (en gris foncé ; symbole K), de son bassin versant C2 et du cordon alluvionnaire gris-clair C1 cernant le tout.

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    Fig. 18 : Vue agrandie de l’étang I1.

     

    a) Les zones rosâtres soutenues représentent la molasse ocre-rouge, blanche, ocre etc… à dominante argilo-marneuse de Carcassonne (Eocène e4-6: Cuisien ; Bartonien) à travers lesquelles les bancs « durs » de grès, microconglomérats et poudingues banals, sont visualisés par un figuré spécial (pointillés).

     

    b) Les zones beige-rosé sont des colluvions C, terme vague désignant en général sur les cartes des dépôts quaternaires de toutes origines, non ou mal identifiées (éboulis, alluvions résiduelles, etc.). Il s’agit en fait selon nous d’alluvions tardiglaciaires venues combler puis coiffer le lac nord I2 sous plusieurs mètres de sédiments.

     

    c) Les zones gris clair sont toutes à attribuer à la succession de terrasses alluviales étagées de la plus ancienne (Fv) à la plus récente (Fz).

     

    Remarque : 2 autres figurés complètent cette série

     

    Ce4-6 : éluvions altérées (de peu d’intérêt) des marnes éocènes

     

    Fw : à l’ouest de Laure, un minuscule fragment de cette terrasse est cartographié. Des sondages à la pelle destinés à tester les assises du futur barrage ouest de rétention du village ont démontré son absence.

    Les éboulis du profil n°3 sont ignorés malgré leur longueur linéaire de 15 kms du sud-est vers le nord-ouest et leur épaisseur record de 30m au moins.

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    Fig. 19 : Tracés : 1) de la courbe C1 d’alluvions continues de plus de 50 kms bordant l’extérieur de l’astroblème.

     

    Ce tracé est seulement interrompu au droit de la valeur de 50.21 km (figurée en jaune au nord), par un col peu marqué coté 186 NGF séparant le ruisseau de NAVAL de celui du CLAMOUX. A noter que ce col est situé dans le prolongement de certains points culminants du bassin versant (241/242 NGF) de l’ex-étang proprement dit. Cette courbe ramène les eaux drainées vers l’Aude à l’ouest comme à l’est

    2) de la courbe située cette fois à l’intérieur du bassin versant et interrompue au droit de la valeur de 12.95 km par un col également « plat » coté 241.5 NGF.

    Ce col singulier (voir plus loin) sépare les ruisseaux de l’Escure de celui de La Grand Combe ramenant tous deux leurs eaux vers l’ex-étang de Laure.

     

    6- Origines de l’étang I1 et du creusement de son bassin versant C2 (par géomorphologie appliquée) - Impossibilités d’un creusement d’origine éolienne

     

    L’étang asséché étant désigné par le symbole K sur la feuille géologique à 1/50 000 de Lézignan , nous citons in extenso la légende de la notice de la carte décrivant cette formation (les surlignages sont volontaires).

    « K. Dépôts de lacs et d'étangs asséchés. Des dépôts fins, limoneux, de fonds d'étangs existent dans la plupart des dépressions fermées des molasses éocènes (étangs de Marseillette et d'Azille) ou miocènes (à l'Est de Lézignan). Ces étangs ont été généralement asséchés depuis le Moyen Age, alors que celui de Jouarres a été récemment remis en eau. Il s'agit de curieux cirques ovoïdes à fond plat, surcreusés par rapport au niveau des cours d'eau environnants et dont l'origine est inexplicable par des influences liées au sous-sol, semble éolienne. »

    Or, cette origine éolienne est morphologiquement et logiquement impossible.

    a) Pourtant il est dit avec justesse sur la notice que les cours d’eau affectés de ce symbole sont surcreusés par rapport au niveau hydrographique régulé par l’Aude.

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    Fig. 20 : Profil altimétrique dilaté (débutant au rond orangé) unissant l’Aude (à gauche) au fond asséché de l’étang.

     

    Le profil passe par le point coté 100 NGF coiffé d’une ancienne terrasse audoise à quartz bleu (rare). Elle est datée, sans preuve, par la carte géologique, du Mindel (Fw2) et non du Riss (Fx) comme l’écart altimétrique de seulement 40m avec le fleuve le laisserait plutôt supposer. Cette information montre que la dépression daterait au plus ancien du Riss qu’elle entame.

     

    Remarque : les glaciations montagneuses alpines et pyrénéennes portent des noms spécifiques qu’il est bon de rappeler dans leur ordre chronologique :

     

    -Biber, Donau, Günz difficiles à différencier les unes des autres et datant du Plio-Villafranchien,

     

    -Mindel (Fw)

     

    -Riss (Fx),

     

    -Würm (Fy1)-Dryas (Fy2),

     

    Ces glaciations ont déposé des moraines limoneuses ocre ou bleues à blocs erratiques au pied des reliefs. De là, elles ont laissé la place à des dépôts lavés d’alluvions fluvio-glaciaires chargées de blocs, galets et sable étalées en terrasses accompagnant fleuves et rivières actuels- chacune de ces terrasses portant le nom de la glaciation correspondante. Plus ces terrasses sont anciennes, plus elles sont élevées au-dessus du fleuve par inversion de relief.

     

    De plus, on doit rajouter une dizaine de mètres de plus à l’«effondrement » si le phénomène est daté comme il est dit de la fin du Würm, le fleuve ayant faussé cette donnée par le creusement synchrone de son lit d’une valeur à peu près équivalente.